SIMILITUDE ENTRE LA SITUATION ECONOMIQUE A LA VEILLE DE LA REVOLUTION DE 1789 ET CELLE QUE NOUS VIVONS AUJOURD'HUI

Publié le par Scaramouche

La révolte des bonnets rouges en Bretagne en 1675.

Cette révolte commenca à cause de ce que l'on avait appellé: "La Révolte du papier timbré", c'était une révolte antifiscale sous l'Ancien Régime, qui s'est produite dans l'Ouest de la France, sous le règne de Louis XIV (d'avril à septembre1675). Elle se produit à cause de la hausse des taxes, dont entre-autre celle sur le papier timbré, nécessaire pour les actes authentiques (que l'on pourrait comparer à ce que sont les timbres fiscaux actuellement).

La révolte aura plus d’ampleur en Basse-Bretagne, en prenant un tour antiseigneurial connu sous le nom de "révolte des Bonnets rouges" (aussi appelé "révolte des Torreben", "casse-lui la tête"), car certains insurgés portaient des bonnets bleus ou rouges selon leur région d'origine. Dans le Centre-Ouest de la Bretagne le bonnet porté par les insurgés était de couleur rouge, tandis qu'il était bleu dans le Pays Bigouden.

Pour financer la guerre contre la Hollande, de nouvelles taxes sont mises en place par le roi.

- La ferme du papier timbré: une taxe sur le papier timbré, en avril 1674, papier rendu obligatoire pour tous les actes susceptibles d'être utilisés en justice (dont les testaments, contrats de vente et accessoirement, les registres d'état civil), ce qui augmente le prix des actes pour les particuliers, tout en risquant de diminuer le nombre d’affaires pour les professionnels, d'où un mécontentement général.

- La ferme du tabac: Le 27 septembre 1674, la vente de tabac est réservée au roi, qui prélève une taxe et en afferme la vente. Les personnes autorisées à revendre le tabac (fermiers et commis) rachètent les stocks aux commerçants qui en vendaient auparavant. La réorganisation des circuits de vente entraine une interruption temporaire de la distribution de tabac à fumer et à chiquer, d'où une autre source de mécontentement.

- À la même période, une nouvelle taxe frappe tous les objets en étain (même achetés longtemps avant), ce qui mécontente les paysans aisés, ainsi que les cabaretiers qui répercutent la taxe, d'où une forte hausse sur le prix des consommations.

- Enfin, une autre taxe, touchant moins de monde, oblige les roturiers possédant un fief noble à verser une taxe tous les vingt ans.

- La Ferme d'Occident: Créée la même année, elle remplace la Compagnie des Indes occidentales.

 

Ces nouveaux impôts et ces menaces s'ajoutent à une situation économique difficile en Bretagne.

La Bretagne est alors très peuplée (environ 10 % de la population Française), et épargnée par les disettes et les épidémies depuis les années 1640. Elle connait des difficultés économiques en 1660-1670, largement liées aux premiers effets de la politique de guerre économique de Louis XIV, de l'augmentation des impôts. Il y a une diminution des deux tiers du commerce du vin et des tissus par le duc de Chaulnes, gouverneur de Bretagne, les revenus issus de la terre (appelés fermages) diminuent eux aussi d’un tiers, entrainant une déflation généralisée.

Le système du domaine congéable, qui régit les rapports d'une partie des paysans cultivant la terre et propriétaires terriens, conduit à une absence d’investissement et d’améliorations des méthodes de culture, aussi bien de la part des paysans que des seigneurs. Ceux-ci, par contre, devant la baisse de leurs revenus depuis 1670, exigent de façon plus pointilleuse leurs autres droits.

La révolte est très souvent menée par des femmes. A cette époque, la législation royale est de plus en plus draconienne à l'encontre des femmes, tous leurs droits sont diminués, aussi bien leurs droits économiques que civils (elles ne peuvent plus choisir leur époux par exemple).

Enfin la Bretagne est un pays d'états, où l'impôt sur le sel, la gabelle, n'existe pas, et où les nouveaux impôts doivent être acceptés par les États depuis l’acte d'Union de la Bretagne à la France. En 1673, les états avaient, outre un don gratuit de 2,6 millions de livres, acheté la suppression de la Chambre des domaines (qui privaient certains nobles de droit de justice) pour la même somme et racheté les édits royaux instituant les nouveaux impôts, plus diverses autres dépenses en faveur du pouvoir royal pour un total énorme de 6,3 millions de livres. Un an après, les mêmes édits sont rétablis, sans consultation des états. Et c'est par le Parlement de Bretagne que Louis XIV fait enregistrer la taxe sur le papier timbré en août 1673, et la taxe sur le tabac en novembre 1674, au mépris des "libertés bretonnes" (c'est ainsi que les Bretons de l'époque appelaient leurs privilèges en vertu du traité d'union de la Bretagne à la France).

Le soulèvement débuta à Bordeaux où du 26 au 30 mars, la ville tombe aux mains des émeutiers. L'insuffisance des garnisons sur place empêche César d'Albret, gouverneur de la ville, de rétablir l’ordre. Les bourgeois refusent la levée de milices, pour palier au manque de troupe. A partir du 29, les paysans des environs arrivent à Bordeaux pour soutenir les constataires. Le parlement de Bordeaux rend alors un arrêt de suspension des nouvelles taxes sous la pression populaire. Ce qui n'empêche pas Rennes et Nantes de se soulèver à leur tour début avril. Le 6 avril, le roi fait une déclaration d’amnistie pour les émeutes à Bordeaux, son gouverneur n’ayant pas les moyens de reprendre la ville en main.

En Bretagne, les émeutes urbaines se limiteront aux villes et de Rennes et Nantes. Partout les bureaux de papier timbré ou de marquage de la vaisselle en étain sont pillés, des affrontements ont lieu. Un premier soulèvement a lieu à Rennes le 3 avril, mais le calme revient rapidement. Une nouvelle émeute se produit le 18 avril (avec au moins dix morts), qui se propage le lendemain à Saint-Malo, où les troubles sont plus limités, puis le 23 à Nantes, et à nouveau le 3 mai à Rennes et Nantes. Guingamps, Fougères, Dinan et Morlaix sont également touchés.

Le 8 juin, les troupes envoyées pour ramener le calme provoquent la colère des Nantais où la troupe est logée chez l’habitant et à sa charge (alors que jusque-là, Nantes comptait parmi ses privilèges l’exemption du logement des gens de guerre). Du 9 au 11 juin le duc de Chaulnes est assiégé dans son château, mais donne l’ordre de ne pas tirer, puis fait évacuer les troupes. Le bureau du papier timbré est mis à sac le 19 juillet à Rennes, pour la dernière fois.

L'exemple des villes sera suivi, à partir du 9 juin, par les campagnes de Basse-Bretagne. La révolte s'étend, de la baie de Douarnenez à Rosporden, Briec et Châteaulin. Les 3-4 juillet, les troubles atteignent les environs de Daoulas et Landerneau, le 6 ceux de Carhaix, le 12 de Brasparts à Callac et Langonnet, et une dernière vague se manifeste les 27-28 aux alentours du Faouët. Des villes qui ne participent pas à la révolte, sont attaquées. Pontivy est prise le 21  par deux mille paysans. Elle sera délivrée par ses bourgeois le 21 juin et le duc de Chaulnes, gouverneur de Bretagne, est obligé de se réfugier à Port-Louis.

Le 23 juin 1675, des paroissiens se révoltent en l'église Saint-Tugdual de Combrit et moleste le seigneur du Cosquer. Peu après, les habitants de quatorze paroisses du Pays Bigouden commencent à détruire tous les actes consignant les privilèges seigneuriaux. Le Code paysan établi le 2 juillet 1675, trouve son origine dans leurs revendications.

Les paysans se révoltent lorsque se répand le bruit que la gabelle va être introduite dans la province. La jacquerie éclate au milieu de la zone du domaine congéable, précisément là où ce régime est le plus dur. Les châteaux sont assiégés et pillés, ainsi que les bureaux du papier timbré ou des devoirs (taxe sur les boissons), et des nobles sont attaqués et tués.

Le maximum de violence est atteint entre jullet et août dans le Poher, quand Carhaix et Pontivy, des villes non fortifiées, sont attaquées et pillées. Début septembre, six cent Bonnets rouges prennent le château du Tymeur et y brûle tous les documents et archives.

Ces violences permettent de faire accepter aux nobles l'abandon de certaines taxes. l’abbaye de Langonnet est aussi contrainte de revoir à la baisse ses redevances en nature et en numéraire.

Les paysans révoltés établissent des codes et règlements, connus sous différents noms.

Le symbolique bonnet rouge sera repris par les révolutionnaires et fera sa réapparition en 1789-1792.

 

Le système inventé par John Law (1715-1720).

Jean de Lauriston ou John Law, est né le 21 avril 1671 à Edimbourg, d'une famille noble Ecossaise. Il est le fils de William Law of Brunton (Baronnet of Lauriston et propriétaire du Château de Lauriston) du clan Law of Lawbridge, et de Jeanne Campbell, du Clan Campbell des Duc d'Argyll.

Il deviendra ministre des Finances du royaume de France, qui lui doit l'introduction du billet de banque et d'une des premières bourses au monde. Son idée et sa théorie économique est que l'argent est un moyen d'échange et ne constitue pas une richesse en soi. Que la richesse nationale dépend du commerce. Pour la France, il devient le principal responsable de l'utilisation du papier-monnaie à la place de l'argent métal. Il est aussi un acteur central de l'Histoire des bourses de valeurs pour avoir réalisé les premières grandes émissions de titres.

Il était le fils d'un banquier d'Edimbourg très influent. A dix-sept ans, il hérite de la fortune de son père. Le 9 avril 1694, lors d'un duel, il tue son adversaire, Edward Wilson, pour obtenir les faveurs d'Elizabeth Villiers, plus tard comtesse d'Orkney. À vingt-trois ans, il est jugé coupable pour ce crime et condamné à mort, par pendaison. Comme il s'agirrait d'un homicide involontaire, la peine sera commuée en amende, mais le frère de Wilson ayant fait appel, Law sera condamné à une peine de prison. Il échappe à cette nouvelle sentence en s'enfuyant à Amsterdam, où il se met à étudier la finance.

Il publie plusieurs essais théoriques sur la masse monétaire dans l'économie, mais ses écrits n'ont pas un grand retentissement. Pendant vingt ans, il va parcourir l'Europe (dont Amsterdam, Paris, Genève, Venise) pour y proposer ses théories, mais elles seront partout rejetées.

A Venise, il étudiera les jeux d'argent, et ses observations lui permettront d'accumuler une grande fortune. Il s'y initiera aussi aux techniques bancaires inovantes de l'époque. Il remarquera que les négociants vénitiens se séparaient facilement de leur monnaie d'or et d'argent contre la monnaie papier, afin de faciliter leurs affaires et ainsi accroître leurs profits.

 

Le principe de la "monnaie papier", qui ne serait plus garanti par l'or ou l'argent.

Il lui vient alors l'idée de monter une banque dans l'un des royaumes européens qui n'en possédait pas encore. Des banques commerciales fonctionnaient déjà à Amsterdam, Nuremberg, Stockholm et Londres. Elles émettaient des billets à ordre en échange de dépôts en monnaie métallique, ce qui assurait la convertibilité des billets à tout moment, gage de sécurité pour les clients, mais interdisait à la banque de prêter à grande échelle. Pour se différencier, il imagine de faire garantir ses billets par les revenus d'une certaine quantité de terres agricoles, qui constituerait le capital de base.

La convertibilité à tout moment, contre de la monnaie or ou argent, n'est en fait pas garantie, mais il donne l'assurance à ses clients que la valeur indiquée sur chaque billet émis correspond bien à une richesse foncière existante. Ce système est une véritable révolution et un premier pas vers l'abandon de l'or et de l'argent comme unique moyen de paiement.

Ce système, mettant en place une nouvelle monnaie, indépendante de l'or et de l'argent, arrivait à propos pour répondre alors à un véritable besoin en liquidité des économies européennes - toujours en besoin d'argent - pour disposer de beaucoup plus de moyens et de souplesse de paiement. L'Europe est alors à la veille de sa révolution industrielle. Or les arrivages de métaux précieux, notamment en provenance des Amériques, étaient de moins en moins abondants, la monnaie devenait rare et les économies stagnaient. Cele semblait mettre fin à l'idée selon lesquelles la richesse dépendait de la quantité d'or et d'argent que les gens possédaient. Un autre avantage apparent de ce système était de pouvoir régler l'émission de la nouvelle monnaie en fonction des besoins de l'économie et de l'état. Law fera une première proposition au roi de Sicile, qui ne se montrera pas interessé. En 1708, une première proposition en France sera écartée par le vieux roi Louis XIV.

Mais le nouveau roi Louis XV qui prendra la suite acceptera la mise en place du procédé.

 

Les conséquences pour l'économie Française du système Law.

Son système a appauvri ou ruiné 10% environ de la population Française, principalement les riches actionnaires. Quelques autres par contre, bénéficiant de renseignements de première main, purent s'enrichir considérablement. Cependant, son système, s'il a fait perdre confiance dans le papier-monnaie et dans l'état, a paradoxalement assaini la dette de ce dernier en faisant prendre en charge le rêglement de la dette par de nombreux épargnants (la dette se retrouve payée non par l'état lui-même mais par l'intermédiaire des détenteurs d'assignats). Cela aurait permis de sauvé (provisoirement) l'économie de la France en un moment où le pays était paralysé par l'endettement généralisé et par la pénurie de liquidités. 

Law, quittera Paris déguisé en femme, afin d'éviter de se faire lyncher par la population. Il se réfugiera à Venise où il mourra le 21 mars 1729.

 

Le retour des assignats sous la Révolution.

L'assignat était une monnaie fiduciaire (ou "monnaie papier") mise en place sous la Révolution française.

Après le système de Law, l'assignat sera la seconde expérience de monnaie papeir en France au XIIIème siècle. Tout comme la première, elle se soldèrera par un échec.

A l'origine, il s'agissait d'un titre d'emprunt émis par le Trésor en 1789, dont la valeur était gagée sur les biens nationaux par assignation. Les assignats deviennent une monnaie de circulation et d'échange en 1791, dont la valeur est le plus souvent comprise entre 2 et 30 sols, et les assemblées révolutionnaires multiplient les émissions, ce qui entraînent une forte inflation. Le cours légal des assignats sera supprimé en 1797.

Déjà, avant la Révolution, les finances royales étaient dans un état catastrophique avec une dette évaluée entre 4 et 5 milliards de livres et la moitié du budget royal sert alors à résorber cette dette qui ne fait qu'augmenter et à servir de rente pour diverses personnes. Déjà depuis 1787 , il commencait à circuler des billets de la Caisse d'escompte pratiquement à cours forcé (c'est-à-dire que le Trésor émettait sur promesse de remboursement des traites qui avaient par là-même, valeur de monnaie puisqu'on pouvait les réescompter, les échanger, les utiliser pour acheter des biens, et enfin les négocier). Et sur le marché, leurs cours ne cessaient de chuter. Leurs rapports diminuant de plus en plus, l'état ne pouvait plus compter sur ces billets.

Le 5 mai 1789, à l'ouverture des Etats généraux, Jacques Necker proposera l'émission d'un "papier national", par le biais d'une caisse d'escompte affectée au règlement de la dette publique et il sera appuyé par Mirabeau. Le risque de banqueroute est grand et il leur faut de toute urgence, trouver un moyen d'avoir de l'argent. Talleyrand, alors député,  propose l'idée de confisquer les biens du clergé (et non pas de les nationaliser car aucune indemnité ne sera versée en compensation). C'est ainsi que le 2 novembre 1789, l'Assemblée nationale constituante décide que tous les biens du clergé seront "mis à disposition de la Nation". Ces biens deviendront ce que l'on appèlera dorénavant des "Biens Nationaux", destinés à être mis aux enchères pour remplir les caisses de l'état.

Cet apport de patrimoine, évalué entre 2 et 3 milliards de livres, constitue un apport financier considérable pour les finances publiques. La mise en vente est confiée à la Caisse de l'Extraordinaire, créée par le décret du 19-21 décembre 1789 et définitivement organisée le 6 décembre 1790.

La vente des biens prendra bien-sûr du temps (au minimum un an dans le meilleur cas). Mais c'est un délai beaucoup trop long, parce que les caisses de l'état sont alors vides.

C'est la raison pour laquelle il est décidé de créer, le jour même de l'ouverture de la Caisse de l'Extraordinaire, des billets dont la valeur est assignée (ou "gagé") sur les biens du clergé. Du le nom choisi de "assignat".

Le fonctionnement de l'assignat est simple. Comme il est impossible de vendre tout de suite les biens du clergé, des billets seront émis, qui représenteront la valeur de ces biens par fraction. La valeur d'un bien sera divisée en assignats, comme l'on ferait d'une société par actions. Toute personne qui désire acheter des parts dans les biens nationaux doit le faire par le biais des assignats. Il faut donc avant tout que les particuliers achètent des assignats auprès de l'état, c'est ainsi que la rentrée d'argent se fera. Une fois que la vente d'un bien est effective, le produit de la vente est inscrit au registre civil et, une fois de retour dans les caisses de l'état contre remboursement, les assignats doivent alors être détruits. De cette manière, cela devait normalement permettre une rentrée d'argent plus rapide, les biens étant vendus de façon indirecte et par fraction, et non en une seule fois.

Mais dès le début de 1790, les premiers problèmes font leur apparitions. Le 30 mars, Anne-Pierre de Montesquiou-Fezensac déclare au sujet des assignats que c'est "le plus coûteux et désastreux des emprunts".

Les 16 et 17 avril 1790, la valeur totale de la première émission est de 400 millions de livres divisés en assignats de 1000 livres avec intérêt de 20 deniers par jour (soit 3% par an). Une valeur nominale si importante, qu'elle ne les destine pas à pouvoir servir de papeir-monnaie utilisable par la population, mais à être thésaurisés par des investisseurs.

L'idée est loin de faire l'unanimité au sein de l'Assemblée nationale constituante, tellement cela rappelle la banqueroute du système de Law. Des députés comme Talleyrand, Condorcet ou Du Pont de Nemours sont contre. Pour eux, le problème majeur de l'émission d'assignats est qu'il ne faut surtout pas qu'il y ait plus d'assignats en circulation que la valeur réelle des biens nationaux ne le permette. De plus, à cette époque, les billets sont facilement falsifiables. Au bilan, il y a donc un fort risque de retrouver en circulation une quantité trop importante d'assignats, et donc de dépréciation.

Le 17 avril 1790, l'assignat est transformé en un papier-monnaie. Il a donc ce que l'on nomme "cours forcé". Et l'état, toujours à court d'argent, l'utilise pour toutes ses dépenses courantes. Et en plus, non seulement l’État ne détruit pas les assignats qu'il récupère; mais pire, il imprime plus d'assignats que la valeur réelle des biens nationaux. Jacques Necker, ministre des Finances, étant résolument contre la transformation de l'assignat en monnaie-papier, donnera sa démission en septembre.

Entre 1790 et 1793, l'assignat perd 60% de sa valeur. Entre temps, la valeur faciale des assignats se réduit de plus en plus. Entre le 4 janvier 1792 et le 23 mai 1793, des valeurs situées entre 10 et 50 sols voient le jour (inférieures à 5 livres), suppléant ainsi l'absence de pièces métalliques et l'usage de ce moyen de paiement se répendra alors parmi toutes les couches de population.

Bien que l'assignat voie sa valeur nominale réduite, les enchères des biens nationaux restent tout de même très élevées et seules des personnes aisées peuvent les acheter. C'est ainsi que certains s'enrichissent énormément en achetant d'immenses terrains et bâtiments pour presque rien, comparé à leur valeur réelle. La surévaluation légale de l'assignat permettant alors d'acheter des biens par conséquent sous-évalués.

Pour soutenir l'assignat, plusieurs lois successives seront votées, toujours plus dures, comme la fermeture provisoire de la Bourse de Paris (décret du 27 juin 1793) et la fin de la publication des taux de change en 1793, de manière à limiter la spéculation, mais aussi de lourdes amendes et de graves peines d'emprisonnement pour toute personne surprise à vendre de l'or ou des pièces d'argent ou traitant différemment la monnaie de papier et les métaux précieux. Y compris le refus d'un paiement en assignat. Le 8 avril 1793, la Convention décide que les prix de tous les achats et marchés conclus avec l'état seront stipulés uniquement en assignats. La mesure sera étendue le 11 avril au secteur privé.

Dès les premiers jours de la Terreur, le 8 septembre 1793, la non-acceptation de l'assignat est déclarée passible de la peine de mort. Les biens des contrevenants sont confisqués et le délateur récompensé. Le 13 novembre 1793, le commerce au moyen des métaux précieux est interdit. En mai 1794, toute personne qui aurait demandé en quelle monnaie le contrat serait conclu devait être condamnée à mort.

Malgré tout cela, les pouvoirs politiques ne savent pas faire face à la crise économique, et l'état continue d'émettre de plus en plus d'assignats, pour financer la guerre aux frontières.

Le nombre d'assignats fabriqués correspond à une valeur de 2,7 milliards de livres en septembre 1792 qui passera à 5 milliards en août 1793. Au début de 1794, les assignats émis atteindront les 8 milliards. Toutefois, les autorités finiront par comprendre que la dépréciation régulière des assignats était due au nombre trop élevé des émissions. Aussi une partie est-elle retirée de la circulation à partir de 1793 au moyen de l'emprunt forcé. En retranchant les sommes récupérées et brûlées, il en reste tout de même encore en circulation 5,5 milliards. En juin 1794, la création d'un nouveau milliard d'assignats, d'une valeur allant de 1000 francs à 15 sous est décrétée, dans le même temps qu'un emprunt forcé sur les riches de cent millions est lancé par le comité des finances.

Après de nouvelles émissions en janvier 1795, cette fois en franc, les assignats mis en circulation dépassent les 10 milliards en août 1795, et les 45 milliards de livres en janvier 1796. Alors que la somme totale des assignats n'aurait normalement jamais dû dépasser les 3 milliards, valeur totale estimée des biens du clergé.

La cause de l'inflation réside dans la surproduction des assignats, le contrôle des prix ne permettant pas de faire baisser leur nombre, mais ayant pour effet de créer la pénurie.

En plus, un grand nombre de faux assignats sont répendus en France. Ils sont fabriqués en Belgique, en Hollande, en Allemagne, en Suisse et en Angleterre, avec la complicité du gouvernement Britannique, principal ennemi de la France. Cela a fortement contribué à accélérer la crise économique Française.

 

Développement supplémentaire par Pierre Jovanovic, qui présente le livre "La crise finançière française (1789-1799) de Andrew Dickson White.

La véritable histoire de la Révolution française de 1789 est avant tout une histoire financière, celle d'une crise sans précédent lancée par un état ruiné par l'effort de guerre en Amérique et surtout par les planches à billets (Assignats et Mandats) des révolutionnaires.

L'auteur, Andrew Dickson White, diplomate Américain, raconte comment les révolutionnaires ont fait marcher la planches à billets intensivement et comment ils ont été confrontés au bon sens des Français qui se sont précipités sur les pièces d'or et d'argent lorsque les Assignats ont commencé à perdre de leur valeur et que le prix du pain a commencé à énormément augmenter. Cela se traduisit par une "république de Weimar" avant l'heure.

Ce livre nous montre aussi que les révolutionnaires ont perdu toute crédibilité avec l'usage abusif des planches d'Assignats puis de Mandats Nationaux (qu'on pourrait comparer aux bons du Trésor d'aujournd'hui). Cela entraîna la France vers la faillite, qui sera plus tard sauvée in extremis quand Boanparte alors général, prendra le pouvoir par un coup d'état en 1799.

Ce ne sera qu'avec la suppression des planches à billets et la restauration du standar or par Napoléon que la France retrouvera enfin son équilibre économique. Ce livre raconte aussi notre crise financière actuelle puisque les États-Unis, le Royaume-Uni et le Japon inondent les marchés, en ce moment même, planches à billets, ne valant désormais strictement plus rien. 

 

Vidéo de l'émission le "Grand Témoin" de Radio Notre-Dame:

Sources:

"La crise financière française de 1798-1799", par Andrew Dickson White, Editions Le Jardin des Livres; 

www.jovanovic.com;

www.wikipédia;